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Portrait Métier: moniteur d’auto-école

by | Jan 24, 2012 | Portraits | 3 comments

 

@ D.R.

Dans le but de mieux connaître ce métier, nous avons rencontré M. Jean-Claude Weingart, moniteur d’auto-école dans son fief du Boulevard James Fazy, à Genève. Celui-ci nous a aimablement reçus pour nous parler de son métier, des perspectives d’emploi, et de sa vision du futur pour la profession. Bonne route pour la suite de la lecture !

 

Une interview de Giselle Paolo et Alessandro De Gregorio

 

GBNews : Pouvez-vous nous décrire en quelques mots l’organisation de l’Auto-école Fazy?

Jean-Claude Weingart: L’Auto école Fazy a été fondée en 1994 par quatre moniteurs, dont trois sont aujourd’hui à la retraite. Nous avons un statut de société simple. Nous sommes neuf collaborateurs qui gérons la salle de théorie (permanence, sensibilisation, et premier secours). Pour les cours pratiques, chacun a son véhicule et est indépendant. La société ne compte aucun salarié.

 

Employez-vous du personnel pour les questions administratives ?

Grâce à nos expériences respectives, nous gérons nous-mêmes les affaires administratives. Nous venons d’horizons très différents. Il y a parmi nous un ingénieur en communication, un pasteur, un transitaire, deux chauffeurs de car. Pour ce qui me concerne, je viens du secteur bancaire, et je possède une maîtrise fédérale.

 

Qu’est-ce qui vous a décidé à changer de métier ?

Avec une maîtrise et plus de vingt-cinq ans d’expérience dans ce domaine, je pourrais théoriquement continuer de travailler dans une fiduciaire ou une banque. Mais la crise est passée par là, et ces vingt dernières années, 25 à 30% du personnel bancaire a été licencié. Dans ce contexte difficile, il m’est venu l’idée de faire la formation de moniteur. Depuis 1968, je possédais déjà tous les permis de conduire.

 

Cela nous amène naturellement à la question suivante : quel est le parcours à suivre pour devenir moniteur ?

Il s’agit d’une formation payante qui se déroule sur trois ans, et qui est organisée en modules. La réussite à un module permet de s’inscrire au suivant, jusqu’à l’obtention du CFC.

Il s’agit d’une formation exigeante qui implique de retourner à l’école durant trois ans. Son coût est d’environ 25 000 francs pour les trois modules, auxquels il faut ajouter les frais (déplacements, repas). Avant de se lancer, il vaut mieux être sûr de sa motivation, mais aussi avoir quelques moyens financiers.

 

Où est basée cette formation ?

Cette école de formation se trouve à Lausanne. D’autres – dont une à Sion – ont fermé. Il se pourrait qu’un centre de formation soit ouvert à Genève. L’Auto école de la Servette s’y intéresse et cherche à décrocher l’autorisation pour le faire dans le but d’organiser une telle formation.

 

Quels sont les débouchés après l’obtention du CFC ?

C’est une profession d’indépendant. A Genève, elle ne compte aucun salarié. Les auto-écoles ne peuvent pas se permettre d’engager du personnel. Il faut bien comprendre le contexte, à savoir qu’en Suisse, les cours de conduite automobile ne sont pas obligatoires. Ce qui est plutôt illogique. Si vous possédez une moto d’un cubage supérieur à 125 cm3, on vous impose 12 heures de cours obligatoires ; mais pour une voiture d’une tonne qui est un véhicule tout aussi dangereux, aucune formation légale n’est requise!

A Genève, à peine un automobiliste sur trois prend des cours de conduite avec des professionnels, ce qui signifie que la majorité des personnes passent leur permis en étant formés par des amateurs (membre de la famille, amis, etc.), avec tous les inconvénients que cela comporte !

 

Quelles sont les qualités requises pour exercer le métier de moniteur d’auto-école?

Patience, calme, pédagogie, et psychologie. En effet, nous enseignons à des élèves d’horizons très différents, ce qui demande une grande capacité d’écoute et d’adaptation. Au niveau de la langue aussi, cela peut être difficile avec des gens peu familiarisés au français. L’examen théorique a été uniformisé et n’est proposé que dans les trois langues nationales suisses, ce qui peut se révéler problématique pour des candidats étrangers.

 

Comment le métier évolue-t-il,  en particulier par rapport aux nouveaux défis du trafic routier à Genève ?

Genève connaît une situation extrêmement compliquée, où rien n’est fait pour faciliter le trafic routier. Pour un élève-conducteur, il est très difficile de rouler dans une ville qui favorise les transports publics. A mon sens, la voiture et les transports en commun devraient être complémentaires.

 

La crise économique actuelle affecte-t-elle votre profession ?

La formation n’étant pas obligatoire, les jeunes viennent de moins en moins. L’époque où l’on formait les futurs conducteurs de A à Z est révolue. Cela se traduit par une grosse diminution du nombre d’heures par client. En 1994, nous donnions environ 50 heures de cours pratiques par semaine ; actuellement cela se limite à une vingtaine d’heures.

Quant au prix d’une leçon, un tarif de 90 francs l’heure de conduite peut sembler cher dans le contexte économique actuel, mais il faut être conscient qu’il s’agit là d’un investissement précieux pour l’avenir! Par ailleurs, un accident lors d’une formation à la conduite avec des accompagnateurs inexpérimentés peut coûter nettement plus cher, non seulement en termes financiers, mais également humains. Or, de tels accident sont loin d’être rares. En résumé : un permis obtenu sur de bonnes bases, c’est un investissement pour une cinquantaine d’année, et en minimisant les risques.

 

Puisque l’on parle de durée, y-a-t-il une limite d’âge pour conduire ?

Non il n’y a pas de limite d’âge, sauf si un conducteur au-delà de la soixantaine provoque un grave accident. Dans ce cas, le Service des autos doit se poser la question de savoir si cette personne est encore apte à la conduite. Cela entraîne une visite médicale obligatoire chez un médecin agréé, avant de repasser l’examen pratique.

 

@ D.R.

 


 

Notre loi en matière d’apprentissage de la conduite est aberrante  

En tant que professionnel et formateur, Jean-Claude Weingart ne cache pas son inquiétude, ni sa réprobation, quant à la façon dont notre pays légifère en matière d’apprentissage de la conduite automobile.

 

Compte tenu de la dangerosité du trafic actuel, que propose-t-on à un niveau légal ?

Une formation en deux phases a été mise en place, mais elle me semble totalement inutile. Il s’agit d’une formation complémentaire de deux jours, après l’obtention de votre permis, c’est-à-dire lorsque vous avez déjà acquis vos mauvaises habitudes de conduite. La première journée se passe sur une piste, pour prendre conscience du comportement d’un véhicule sur route sèche, sur route mouillée, les distances de freinage à respecter. La seconde journée est consacrée à une récapitulation des sanctions légales prévues durant la période probatoire de trois ans pour les jeunes conducteurs. Mais rien n’est corrigée quant aux habitudes prises au volant !

 

Contrairement aux cours de conduite, cette formation complémentaire est donc obligatoire. Cela n’est-il pas illogique ?

C’est même aberrant. Le message que fait ainsi passer la loi suisse, c’est : faites votre permis d’abord, on vous dira après si c’est juste ou si c’est faux. Pourquoi sommes-nous les seuls en Europe à ne pas avoir de leçons obligatoires? En France, par exemple, 20 à 25 heures de conduite avec un moniteur sont imposées.

 

La situation suisse entraîne-t-elle un nombre d’échecs important lors de l’examen ?

Près d’un tiers des candidats au permis échoue au premier passage. C’est une proportion qui ne m’apparaît pas excessive compte tenu des conditions de formation des jeunes conducteurs. La plupart du temps, ceux-ci viennent prendre des cours un mois seulement avant l’examen. La première fois, on leur explique ce qu’il faut corriger ; lors du deuxième cours, on tente de vérifier s’ils ont compris ; et à leur troisième leçon,ils nous disent qu’ils ont leur examen la semaine suivante! On ne peut pas appeler cela une formation ! Si l’on veut diminuer les risques d’accidents chez les jeunes conducteurs, il faut les former correctement. Or, la plupart de ces jeunes conducteurs ont intégré les défauts d’apprentissage des parents et amis avec lesquels ils ont fait de la conduite accompagnée.

 

Est-ce que les examinateurs étaient plus exigeants avant l’introduction de la formation en deux phases ?

Ils l’étaient, en effet, notamment d’un point de vue technique. Les erreurs purement techniques ne sont plus sanctionnées aussi durement qu’elles l’étaient auparavant.

 

En conclusion pourriez-vous nous raconter une anecdote amusante qui vous est arrivée au cours de votre carrière ?

Je me souviens d’un élève conducteur qui refusait de freiner pendant les exercices de freinage d’urgence. En fait, il n’osait pas freiner brusquement. Pour l’obliger à le faire, nous avons pris de la vitesse face à un container. L’obstacle se rapprochait… mais il est resté le pied à fond sur l’accélérateur ! J’ai dû moi-même débrayer et freiner au dernier moment.

 

3 Comments

  1. Isabelle Schneider

    Votre article m’a beaucoupp intéréressée toutefois je cherche à connaître le salaire horaire d’un moniteur auto-moto. Je me doute qu’on ne peut que l’estimer, mais est-il possible d’avoir une fourchette pour me donner une idée. Je ne trouve pas cette information sur les sites de formation, ni même de l’orientation professionnelle. Pouvez-vous m’aider ?
    D’avance merci de votre réponse.
    Meilleurs messages.
    Isabelle Schneider

    Reply
  2. BARBIER

    Bonjour,

    Je souhaite devenir monitrice indépendante sur Genève et je dispose du BEPECASER, en attente de faire la formation B3 pour valider mon diplôme de français.
    Est-ce qu’il y a de l’avenir dans cette profession indépendante en Suisse??? et combien gagnons-nous comme salaire en tant qu’indépendant, quand on dépend d’une enseigne en SARL ou en étant indépendant seul??
    Pourriez-vous m’aider SVP??.
    D’avance merci de votre réponse,
    Cordialement,
    Caroline BARBIER

    Reply
  3. Gigi

    Bonjour Caroline,

    Je viens de lire votre commentaire et je suis actuellement dans le même questionnement que vous…Avez vous entrepris les démarches pour la formation B3? Moi je suis encore en attente de réunir toutes les informations que le Sefri a besoin pour la reconnaissance du diplôme et donc je pense qu’il vont me demander de suivre cette formation.

    Avez vous eu des réponses à vos questions depuis votre message du mois de mai.

    Bien à vous et merci d’avance pour votre retour

    Reply

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