
Comment réagiriez-vous si vous appreniez que le livre que vous êtes venu chercher en bibliothèque ou en librairie avait été retiré des rayons ?
Aussi loin que remontent mes souvenirs, j’ai toujours eu le privilège d’avoir des livres à portée de main. Petite, lors des mercredis après-midi à la bibliothèque municipale, je pouvais choisir moi-même mes histoires du soir, celles que mes parents me raconteraient avant d’aller dormir. Je m’émerveillais du choix qui s’offrait à moi et de cette multitude d’album jeunesse aux illustrations fascinantes et colorées.
C’est ainsi que dès mon plus jeune âge, les livres m'ont ouvert des fenêtres sur le monde. Chaque page tournée était une nouvelle aventure, chaque histoire m'a aidée à construire mon imagination et mon esprit critique. Cet amour de la lecture m'a fait découvrir ma vocation et je suis devenue agente en information documentaire.
L’apprentissage de ce métier permet de découvrir le rôle essentiel des bibliothèques, c’est-à-dire l’importance de la démocratisation de l’accès à la culture et de la mise en œuvre des moyens nécessaires pour accueillir des publics variés. En effet, les bibliothèques s’adressent à chaque personne, indépendamment de son âge, sa nationalité, ses convictions politiques, ses capacités physiques ou mentales, son identité de genre, son patrimoine, sa formation, son revenu, son statut d’immigré ou de demandeur d’asile, sa situation de famille, son origine, son appartenance ethnique, sa religion ou son orientation sexuelle (code éthique de l’IFLA).
Cependant, les missions des bibliothèques sont mises à mal dans des pays où on ne pense pas que cela puisse être le cas de nos jours. Tout comme mes collègues du secteur de l’information documentaire, j’observe depuis quelques années la croissance d’un mouvement de censure littéraire, notamment aux Etats-Unis.
Peut-être avez-vous eu l’occasion de lire « La Servante écarlate » de Margaret Atwood ou connaissez-vous les œuvres de la poétesse contemporaine Rupi Kaur. Si ce n’est pas le cas, réjouissez-vous, vous pouvez tout à fait vous les procurer gratuitement dans votre bibliothèque la plus proche.
Ce n’est malheureusement pas le cas dans plusieurs états américains. Les deux autrices précitées ne sont qu’un exemple parmi tant d’autres écrivains dont les livres sont aujourd’hui absents des étagères de nombreuses bibliothèques scolaires et publiques, qui n’ont plus l’autorisation de les mettre à disposition de leurs usagers.
Comme le témoigne l’index des interdictions de livres scolaires – 2023-2024 de Pen America, une organisation dont l’engagement est de « protéger la liberté d’expression aux États-Unis et dans le monde », la liste des ouvrages bannis est longue.
La censure n’a pas uniquement un effet sur les bibliothèques et leurs employés, cela a un impact sur les publics qui les fréquentent et, surtout, sur ceux qui ne les fréquentent pas encore. De même, les personnes de diverses origines culturelles et celles de la communauté LGBTQIA+ s’en trouvent fortement impactées.
Les dangers de la cancel culture se sont déjà fait ressentir durant les périodes troublées du siècle dernier. Les autodafés et listes noires mis en place durant Deuxième Guerre mondiale appartiennent à un passé qui n’est pas si lointain et certains événements majeurs liés à la censure littéraire actuelle démontrent que nous ne sommes pas encore tous sortis de notre caverne de Platon.
Afin de vous parler plus en détails de la résurgence de la censure littéraire, nous avons donc cherché à analyser et à comprendre les enjeux et impacts observables dans nos sociétés contemporaines, en explorant plusieurs aspects que nous détaillerons dans une série d’articles :
Interrogeons-nous sur cela : comment pouvons-nous nous forger une opinion et nous faire un avis sur le monde qui nous entoure si nous n’avons pas accès aux ressources culturelles nous permettant de le faire ?
Crédit photo : Chloé Wahl
Dès mon plus jeune âge, les livres m'ont ouvert des fenêtres sur le monde. Chaque page tournée était une nouvelle aventure, chaque histoire m'a aidée à construire mon imagination et mon esprit critique. Cette fascination pour le monde des livres m'a naturellement menée vers ma vocation, devenir agente en information documentaire. Mon but est de continuer à connecter les gens avec les bons livres et les bonnes ressources numériques. Il me tient également à cœur de rester engagée dans la mission primordiale des bibliothèques : promouvoir l'accès à la culture pour tous les publics malgré les nombreux défis qui s'imposent.